Crayon magique

Je sillonne dans les rues de cette ville qui fut autrefois mienne ;
Mon objectif est clair : marquer l’écorce avec Amour entre ses veines.
Foncer dans le magasin capitaliste pour récupérer le matos avant sa fermeture ;
Mission vite accomplie, ne reste qu’à chaparder dans les ures.
J’écris l’Anarchie en toute impunité,
Souvent devant des conditionnés étonnés,
Parfois devant des sympathisants qui marchent sereinement ;
J’apprécie cette liberté d’agir franchement tranquillement.

Me voilà de retour en cette folle rue commerciale ;
Esquiver les caméras, les camés et les mygales ;
Nouveau spot perçu par ma vue perçante,
Je tourne la tête juste à temps pour jauger les condés,
Mon cœur palpite un court instant et je tourne dans une rue adjacente,
Puis continue à poser avec confiance la marque sacrée.

Désormais, c’est mon estomac qui s’agite et je chine un siège pour souper ;
Mon regard empathique s’agite à la vue de ce jeune homme à même le sol,
Je le salue et m’avance vers cette rencontre invraisemblable mais vraie.
Nous échangeons dans l’amour inconditionnel et bénévole,
Les passants passent en pensant faire semblant de ne pas nous percevoir,
Nous étalons toute notre impromptue tristesse sur le trottoir.

Le pauvre bougre est paumé, détroussé de ses papiers ;
Sa femme et son enfant de deux ans bien éloignés,
Il a quitté son pays espérant de jours meilleurs,
Mais les opportunités vendues ne sont qu’un leurre.
Réduit à la rue, il espère retourner en Roumanie
Rejoindre sa famille et retrouver son ancienne vie ;
Il prie son Dieu, attendant un signe du ciel.
Sciemment, je sollicite mon silence par respect circonstanciel.

Bientôt partir pour prendre le train ;
Je lui sers la main et lui espère de meilleurs lendemains.
Sur le trajet, je repense à tout ce tragique
Tout en continuant à tracer avec mon crayon magique.