Creare

Mes paupières s’ouvrent et déjà le flot de pensées me recouvre
D’un voile de poussière qui se dévoile après un autre rêve de pierre.
J’ai vu la fin s’approcher et j’erre.
Je ne sais pas si j’ai tort de croire qu’hier est déjà mort.
Je me souviens avoir posé mon regard sur ce dernier instant,
Assistant sans méfiance au présent croupissant.
Dehors, j’entends le chant des oiseaux ; mais bientôt
Une musique triste s’immisce et m’envoûte sous la voûte.

Voilà un moellon plongé dans un puits sans fond où l’adieu tombe en disgrâce,
Parce qu’une succession de saisons s’enfuit dans la nuit de glace.
S’éloigner, c’est cesser d’exister peu à peu et renoncer au désaveu.
Revoilà une partie de moi qui s’offre à toi qui demeure en tout lieu et à toute heure.
Je sais que tu as peur, mais sache que la solitude de l’esprit envahit aussi mon cœur.
Je l’ai appris au cours d’une morne stupeur antérieure
Qui subsistera bien au-delà de cette sinistre esquisse.

Pourquoi est-ce que je me perds systématiquement hors du temps ? Pourquoi est-ce que je persiste ainsi en fantaisiste assis sur la frise ?
J’insiste parfois avec allégresse, m’éloignant d’une certaine paresse.
Il paraît qu’il ne reste presque rien de magique dans ce quotidien tragique.
Le soleil mélancolique se lève et enlève le doute critique qui s’égoutte :
Le liquide tacite s’est écoulé et j’ai pu m’arrêter pour créer.